“ You Belong To Me ”
(Prologue)

Écrit et illustré par Manuella

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Le ciel était rempli d’étoiles, par cette magnifique soirée d’été. La chaleur était insoutenable à New York.

À travers l’une des fenêtres d’un superbe hôtel très à la mode, une jeune fille aux cheveux couleur de lune regardait les passants. Elle ne remarquait pas qu’un jeune homme était appuyé contre la porte et la fixait ; il s’agissait de Terrence Grandchester. Il ne la voyait que de profil mais pouvait facilement se représenter ses traits d’une grande délicatesse masqués par l’obscurité de la pièce. Le regard de la jeune fille était d’un bleu nuit au point qu’on eut cru que ses yeux étaient noirs. Ils avaient une intensité hors du commun ! On y voyait de la douceur, de la sensualité et cette petite flamme indescriptible qui semblait lutter contre on-ne-sait-quoi.

– Oh ! Terry je ne t’avais pas vu, dit-elle en se retournant vers le garçon brun qui se tenait à la porte de sa chambre.
– Le coche attend en bas, Suzanna. J’ai cru comprendre que tu désirais sortir en ville ce soir ?
– Oui, oui… J’arrive. Veux-tu mettre un peu de lumière, s’il te plaît ?

Terry obtempéra et regarda Suzanna incertain… Que lui était-il arrivé ?... Cela faisait plusieurs mois déjà qu’elle refusait de paraître en public ; que cela soit pour une fête organisée par ses parents ou pour une représentation théâtrale dans laquelle il se produisait, ce qui était fortement inhabituel car au début elle y venait toujours et l’accompagnait partout. Maintenant, Suzanna avait pris pour habitude de rester dans un hôtel tout le jour et la nuit, alors que Terry répétait d’arrache-pied de son coté. Un hôtel qui de surcroît se trouvait toujours à bonne distance du théâtre !! Aujourd’hui, alors qu’il était à Broadway il avait reçu un message téléphonique d’Edwards, un homme qui servait de valet à Suzanna, lui faisant part du désir qu’avait celle-ci de sortir dîner en ville le soir même ! C’était d’autant plus étonnant qu’elle prenait d’ordinaire ses repas dans sa suite.

– Terry ?... Terry ?... Je crois bien que tu ne m’écoutes pas, dit-elle. Quelque chose te préoccupe ?
– Oh ! Non. Ce n’est pas cela, je pensais juste et je me demandais où tu voulais dîner ?
– Ah… Eh bien, j’avais pensé à un restaurant pas très loin. Avant, maman et moi y allions souvent.
– Bien.
– Alors ?... Qu’attends-tu pour venir m’aider ? Je n’atteindrai pas la commode sans mon fauteuil ! dit-elle en souriant.
– Oui, oui, bien sûr ! Mais dis-moi plutôt ce que tu veux ?
– Eh bien… Il y a une barrette en forme de feuille dans le tiroir de gauche. J’aimerais la mettre.

Terry alla chercher l’objet et le trouva rapidement. Elle l’accrocha à sa chevelure et Terry l’installa dans son fauteuil roulant. Elle jeta un dernier coup d’œil au miroir qui se trouvait en face d’elle et se dit qu’elle aurait peut-être mieux fait de mettre autre chose. Elle avait fait l’acquisition de cette robe il y a deux mois alors qu’ils étaient à Sacramento. Elle était fluide et se terminait par deux nœuds qui posaient d’une merveilleuse façon sur ses épaules ; la robe était très simple sans aucun autre ornement. Voilà pourquoi elle voulait porter cette broche qui illuminait un peu plus sa tenue. Toutefois elle était insatisfaite du résultat. Le soleil de New York avait teinté sa peau d’une légère couleur jaune ! On aurait dit qu’elle était malade !!

Terry et elle sortirent donc. Ils ne tardèrent pas à arriver au restaurant. Terry, au grand dam de Suzanna, était toujours très distant et parlait peu. Elle avait fait de son mieux au cours cette dernière année pour le soutenir et l’encourager dans ses efforts à devenir le meilleur en tant qu’acteur ; elle avait même espéré qu’un jour peut-être il finirait par lui être profondément attaché et l’aimer, mais son comportement l’avait vite fait déchanter ! Il passait son temps à travailler et quand ils se retrouvaient ensemble, il avait l’air ailleurs, un peu comme s’il pensait à quelque chose d’autre. Oui ! Bien sûr, il pensait à autre chose ou plus précisément à quelqu’un d’autre ; une personne aux cheveux d’or dont le sourire le poursuivait sans cesse : Candy !! Elle sentit tout à coup une vive douleur. Candy ! Celle-ci avait réussi à avoir ce qu’elle-même désirait le plus au monde : l’amour de Terry ! Il n’avait envers elle que de la pitié tout au plus ! Il se comportait comme s’il devait accomplir une tache pénible ; mais force était d’admettre qu’il avait quand même sacrifié son amour pour Candy. C’est d’ailleurs cela qui l’avait fait croire que peut-être… Un jour, oui peut-être... Mais de nombreuses questions et doutes ne cessaient de la tourmenter. N’était-ce pas par honneur et bonté d’âme qu’il était resté à ses cotés ? Non, non ! Personne ne ferait une chose pareille ! Pas juste pour ne pas ressembler à son père, pas juste pour avoir la conscience tranquille ! Non, il n’aurait pas osé ! Il n’aurait pas été aussi stupide pour croire qu’il valait mieux pour elle qu’il soit à ses cotés alors qu’il pensait jour et nuit à une autre ! Non, non… S’il l’a fait, c’est qu’il pensait pouvoir vivre sans Candy et finir par l’aimer, elle ! Candy avait fait preuve d’une grande noblesse de cœur en le lui laissant mais Terry n’avait-il pas fait de même ? Après tout, c’est un jeune homme fier et plein de courage.

– Non, je ne peux y croire !
– Je te demande pardon ??? questionna Terry.
– Oh ! Non… Je… Enfin, je…
– Oui ?…
– Je pensais à autre chose, finit par déclarer Suzanna.
– Tu n’as pas beaucoup mangé... Qu’y a-t’il ?... Tu te sens mal ?... demanda Terry la voyant tout d'un coup si pâle.
– Mais si, si… Je mange... C’est que…
– Ne fais donc pas tant de mystères !
– Eh bien, j’aimerais beaucoup retourner sur la côte Ouest. Je n’ai guère pu en profiter l’autre fois. De plus… j’ai reçu une lettre ; elle est pour toi et moi.
– Oui ?
– Mes parents sont en ce moment même là-bas car l’une de mes cousines va bientôt se marier et nous sommes invités ; j’ai pu l’avoir au téléphone et j’aimerais beaucoup y aller… Avec toi, bien sûr, si toutefois tu es libre ?… Je crois que c’est le cas car tu m’avais dis que ce mois-ci tu donnais ta dernière représentation de l’année. Mais comme je ne me tiens plus au courant de ces choses-là, je n’ai pas encore donné de réponse.
– Quand aura lieu ce mariage ?
– En août... Le 25 août.
– Eh bien, en vérité les représentations ne se terminent que le 30 août ; je crois que tu devras y aller sans moi ; Edwards t’accompagnera. De toute façon tu ne seras pas seule.
– Oui, c’est évident, murmura-t-elle. De toute façon, cela ne t’aurait sans doute pas amusé car c’est toujours l’occasion pour mes oncles d’inviter d’autres gens de la haute société de la Côte et les conversations sont d’un intérêt qui frôle l’ennui ! déclara-t-elle en souriant.
– Le gratin de la Côte Ouest, dis-tu ?
– Oui, oui. Il y aura les Smith, les Andrews et d’autres familles que je ne connais pas bien… Comme les Cortez et les Legrands.

Terry la dévisagea d’une drôle de façon.

– Sais-tu si les André sont invités ?
– Les André ?… Oui, je crois ; il y aura un certain M. Albert André. Oui, je pense que c’est cela ; tu le connais ?
– Il s’agit d’un vieil ami. Mmm… Je viendrai peut-être, Suzanna… Je verrai.

« Albert André ? », songea-t-elle… Candy ! Le nom de Candy était André ! y avait-il un lien entre cet Albert et celle-ci ?… Après avoir longuement réfléchi, Suzanna se rappela que les Legrands et les André étaient deux branches d’une même famille. Il s’agissait d’une très grandes famille, mais celle-ci était concentrée pour l’essentiel sur cette partie du pays.

– Tu connais ce Monsieur depuis longtemps ?
– Mmm…?
– Je voulais savoir si ce fameux Albert était un de tes amis proches ?
– Oui, je l’ai rencontré à Londres il y a plusieurs années et nous sommes devenus amis.

Terry songea aux nouvelles qu’il avait reçues au sujet d’Albert il y avait peu et en fit part à Suzanna. Alors qu’il était à une soirée mondaine, il avaient revu cette chipie d’Eliza qui n’avait pas manqué l’occasion de parler en mal de Candy ! Mais grâce à elle, il avait appris qu’Albert n’était autre que le père adoptif de sa chère Candy !!! Il n’en avait pas cru ses oreilles !

– Oui, je ferai de mon mieux pour faire un saut au mariage de ta cousine !

La soirée se termina sans que Suzanna ne parlât de nouveau du sujet ; elle n’était pas dupe ! Ce n’était pas pour le plaisir de revoir un vieil ami que Terry voulait venir maintenant. Et même si ça avait été le cas, elle aurait été très malheureuse car cela aurait voulu dire qu’il  lui préférait un ami ! Non, s’il voulait y aller, c’était dans l’espoir de revoir Candy !! Bien que Suzanna souriait, faisant mine d’écouter Terry, son cœur, lui, était à l’agonie.

 

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